Les Textes de L'atelier Ecritures au Pluriel du mois d'Octobre 2012

 

Jeudi 4 Octobre

Consigne 1 :

Sur scène, sous le feu des projecteurs, vous êtes assis face à Jean Vilar, dialoguez avec lui.

« Allez, dépêche-toi, c’est à toi maintenant », me souffla le régisseur. Je sentis le velours noir me frôler l’épaule et cela provoqua une réaction épidermique, un léger frisson. J’avais la chair de poule. Le trac sans doute. Les projecteurs faisaient danser des flocons minuscules dans leur faisceau mais moi je ne dansais pas. Mes jambes tremblaient. Le trac sans doute. L’homme était à califourchon sur sa chaise en bois, au centre de la scène. Je m’avançais vers lui et contre toute attente, il enleva le masque sévère qui le couvrait et je le vis sourire. Dans son regard il n’y avait pas de gravité mais une bienveillance tranquille. Il ne dit rien ce qui accentua mon trac.
Je finis par m’asseoir en face de lui, à même le bois de la scène.
« Qu’attendez-vous de moi ? », dis-je. Son silence fut sa seule réponse.
« Bon, alors je me présente. Je sais que vous êtes le directeur du théâtre, que vous avez créé le festival d’Avignon, alors autant que vous sachiez à qui vous avez à faire. Donc voilà je ne connais aucune pièce, je ne sais pas très bien parler et j’ai le trac. Je continue ? »
Son regard ne quittait pas le mien et j’y sentis comme un encouragement. Alors, je poursuivis.
« Vous devez vous demander ce que je fais là. Vous avez raison. Acteur est-ce un métier ? J’ai essayé au conservatoire, j’ai pris des cours de diction. Je n’y arrive pas. Mais je n’arrive pas à renoncer. Là encore vous devez vous demander pourquoi. »
Maintenant je me sentais plus à l’aise. J’avais plié mes genoux sous moi et m’appuyais sur la main.
Je lâchais : « En fait, je voudrais simplement être acteur de ma propre vie. Ne pas subir, ne pas rester confinée derrière un rideau, avoir autre chose que de la lumière artificielle pour vivre. Pouvez-vous m’aider ? »
Je sentis à sa manière d’appuyer ses avant-bras sur le dossier de la chaise que je pouvais poursuivre. Son acquiescement était impalpable, inaudible.
« En fait j’aimerais écrire, écrire avec les autres, construire des textes, des jeux avec du texte et vivre cela n’importe où, pas forcément au théâtre où ça sent le renfermé. Dehors, sur un banc, près d’un lac, sur un bateau qui vogue. »
Machinalement, avec mon index j’avais écrit des mots sur la poussière déposée sur le bois. Je me penchais pour en ajouter un autre.
Je sentis comme une vibration dans l’air, rien d’autre dans le silence. En relevant les yeux, je m’aperçus que la chaise était vide.
Là, je compris. C’était à moi de faire mon chemin d’actrice, de femme, d’être humain, seule et sans béquille.
Ce fut tout, les projecteurs s’éteignirent.

Dominique

Bonjour Monsieur Jean Vilar. Je suis très heureuse et flattée d'être assise, face à vous et, très honorée et curieuse de votre savoir.
Vous êtes un grand homme. Je me languis d'échanger avec vous des mots qui vous appartiennent et qui vous sont propres.
J'ai besoin de me nourrir de vos poèmes, de votre parcours car moi-même je ne suis rien et plus jeune que vous. Je ne connais rien de la vie. Je suis là, devant vous, pour boire vos mots, vos phrases, votre intelligence. Apprenez-moi, je vous écoute.
Je suis lasse, ma tête est vide, aidez-moi à la nourrir. Je reste auprès de vous, devant vous, assise. J'ai tout mon temps pour vous.
Libérez-moi de ma paresse et donnez-moi votre chaleur des mots, des lignes. Racontez-moi votre parcours, de votre propre bouche. Lisez-le moi, en me racontant doucement. J'ai tout mon temps.
Je reste là, je ne me lasse pas de votre présence. Puissiez-vous m'accorder plus de temps. Du temps au temps.
Merci, lui répondis-je, après notre entretien, j'ai appris devant vous et je continuerai à vous lire et à écrire comme vous.
Quand j'aurai un moment de faiblesse, je serai encore avec vous.
A bientôt Monsieur Jean Vilar et encore merci.

Et s'éteignirent les projecteurs.

Marie

Monsieur Jean Vilar bonjour, cela fait longtemps que vous faites du théâtre, quelle chance !
Pour s'exprimer, c'est l'idéal ! Je ne vous connais pas personnellement, mais j'ai entendu parler de vous.
Vous êtes né à Sète. Le théâtre a démarré tout jeune ou à un âge avancé ?
C'est pas simple de parler devant tant de personnes en face de vous, monsieur Jean Vilar, d'inventer des pièces de théâtre, donner des rôles à des personnes. C'est tout le temps réfléchir ! Il faut faire une école pour apprendre à parler, heureusement que ce n'est pas écrire, sinon il y aurait beaucoup d'absents.
Sur cette phrase, je vais vous quitter en vous laissant sur cette scène.
Vous n'êtes pas là vivant mais votre âme se promène dans certains théâtres.
Je ne vous dis pas « à plus tard » mais dans un autre monde !

Josette

Moi – Bonjour Monsieur Vilar.
Lui – Appelez-moi Jean.
Moi – Je n'oserais pas même si nous sommes tous les deux Sétois.
Lui – Et que venez-vous faire sur cette scène ? Vous voulez faire du théâtre ?
Moi – Oh non, je ne suis pas assez timide pour ça. En fait, comme nous célébrons le centenaire de votre naissance, je souhaitais faire un peu mieux votre connaissance.
Lui – Déjà cent ans que je suis né. J'ai toujours regardé devant moi, je n'ai pas envie de me retourner sur mon passé.
Moi – Alors, je ne vais pas vous en parler, mais, dîtes-moi, que pensez-vous du théâtre aujourd'hui ? Du festival d'Avignon que vous avez créé?
Lui – Le théâtre est comme je l'ai voulu, ouvert à tous, même aux plus défavorisés.
Moi – Oui, enfin, quand même, les SDF n'y ont pas droit.
Lui – Et pourquoi pas ? Qui les empêchent d'y entrer ?
Moi – Mais, ils n'ont pas d'argent pour y aller, même si...
Lui – Il faut des spectacles gratuits alors !
Moi – Mais les artistes doivent vivre, vous en êtes un, vous le savez. Et puis, sans argent, pas de costumes, pas de décors...
Lui – Si j'étais là aujourd'hui, j'irais dans les rues jouer avec ma compagnie.
Moi – Ce qui nous ramène à Avignon, il y a le festival In dont vous êtes à l'origine, mais votre esprit est plus proche du Off.
Lui – Oh oui ! J'aime savoir que tous ces lieux sont investis par de jeunes comédiens qui, s'ils n'ont pas toujours le talent, ont au moins l'envie.
Moi – Alors, que feriez-vous face à ce festival In qui semble réservé à une élite maintenant ?
Lui – Je réinvestirais la place avec tous les jeunes talents et, tout comme la scène du Palais des papes est ouverte à tous les vents, je l'ouvrirais en grand à tous ceux qui savent encore s'émerveiller.
Moi – Eh bien, monsieur Vilar, je vois que vous n'avez rien perdu de votre enthousiasme, de votre fougues face aux directeurs faiseurs d'argent.
Lui – Et croyez-moi, ce n'est pas près de s'arrêter !
Moi – Mais vous êtes mort, vous savez.
Lui – Peu importe puisque mon esprit vous parle encore. Tant que vous m'entendrez, le théâtre populaire continuera d'exister.

Isabelle

Anny : Bonjour Monsieur Vilar, je suis contente de vous rencontrer même si nous n'avons que peu de temps avant la reprise de la répétition que vous dirigez, j'ai une petite question à vous poser, merci d'accepter d'y répondre.
Vous dites que le théâtre "populaire" signifie "apprendre", cela veut-il dire que votre thêatre traite de tous sujets et qu'ils sont accessibles à tous publics ?

Mr Vilar : Oui, les sujets que je mets en scène sont très divers : mœurs, politique, humour, mon théâtre est un théâtre de rue, qui peut se jouer partout, y compris dans un lieu comme celui-ci, vrai beau théâtre... j'aimerais habituer tout un chacun à faire la démarche de venir nous rencontrer, d'apprendre qui nous sommes, comment nous fonctionnons, je veux bousculer chaque personne en l’entraînant dans mon univers théâtral, dans mes rêves, et le premier de ces rêves est d'offrir la possibilité à des gens peu avertis de pénétrer au moins un fois dans un théâtre, leur donner le plaisir de cet instant solennel qui est la découverte du lieu, la magie du lustre gigantesque, le "faux" luxe des fauteuils souvent écarlates, l'immense rideau rouge baissé cachant la scène, majestueux et mystérieux, tout ceci suscite murmures et émerveillements, pour nous qui sommes cachés derrière ce rideau, c'est déjà un immense plaisir partagé.
Le deuxième rêve est de captiver l'attention de ce public, par les incessants mouvements des acteurs, leurs mimiques, leurs dialogues parfois percutants qui portent à la réflexion, je veux qu'on sorte de cet endroit plein d'interrogations, amusé, perplexe, c'est cela apprendre, c'est mettre des mots sur les pensées difficiles à exprimer, nous autres acteurs sommes là pour mettre en scène ces mots, véhiculer des idées, en laissant la liberté a chacun de prendre ce qu'il veut, plus on prend avec soi, plus on tend vers sa propre liberté, ça c'est ce qui motive vraiment mon travail, j'y crois, ça me porte, ça m"aide a continuer, cet échange est primordial.

Anny

Consigne 2 :

Que vous inspire ces citations de Jean Vilar : « Théâtre populaire signifie apprendre ; et apprendre, libérer l'homme. »
« La culture c'est d'abord une entraide, pas une aumône. »

Anny : Monsieur Vilar, une deuxième question si vous le permettez... merci.
Que voulez vous dire par « la culture c'est d'abord une entraide, pas une aumône » ? Même si vous avez pratiquement répondu à cela dans la première question, pouvez vous approfondir votre pensée ?
Mr Vilar : Par la culture j'entends le cinéma, le théâtre, la peinture, l'écriture, les musées, bien sûr, mais aussi et surtout la connaissance de l'autre, si chacun se donne la peine d'écouter l'autre, de reconnaître en lui une entité à part entière avec ses idées, sa vie, son histoire, il sera plus à même de lui apporter de l'aide et réciproquement, seule la culture permet ce développement de l'esprit, et permet à l'homme de prendre conscience qu'il n'est pas seul, que d'autres, bien des siècles avant le sien, ont réfléchi, ont élucidé certaines questions et nous ont communiqué leurs savoirs par l'écriture, par les arts, et nous hommes du XXIème siècle ajouterons notre savoir et transmettrons le tout aux générations futures ; la culture est le contraire de la solitude, elle est universelle et résiste au temps qui passe, comment se sentir seul au milieu de tant de richesse, nous puisons dans cette manne chacun à notre façon, et si nous échangeons notre compréhension, notre culture, alors nous serons riches.
Ce que je m'efforce à faire c'est de communiquer une petite partie de culture accessible à tous, c'est ma façon d'aider mes semblables, et de grandir moi même.
Anny : Merci Mr Vilar et bonne chance pour que cette grande idée de partage, d'entraide, parvienne jusqu'au plus profond de chacun de nous.

Anny

Apprendre c'est se libérer, dîtes-vous monsieur Vilar. Oui, la connaissance nous ouvre des portes, dont celle du théâtre.
Lorsque l'on a appris on peut voir se lever le rideau rouge de sa vie. D'un pas plus sûr monter sur cette scène où nous allons jouer le rôle qui nous est imparti.
Mais peut-être, au cours de la pièce, à l'acte suivant nous changerons de personnage, nous deviendrons spectateur à notre tour, ou bien metteur en scène.
Mais ce savoir que nous avons acquis nous permettra de dire « non » au choix que l'on veut nous imposer. Et nous remonterons sur la scène de ce théâtre populaire pour tendre la main à ceux qui en on besoin.
Jouant la comédie ou le drame, à notre tour nous aiderons ceux qui n'ont pas eu la chance d'apprendre et de se libérer. Leur chaleur, leur présence, leurs cris, leurs applaudissements nous ferons nous sentir vivants. Ils seront peut-être moins tristes en repartant, nous aurons mis du soleil dans leur vie et, je l'espère, ouvert leur esprit.
Et lorsque le rideau se refermera, nous nous sentirons moins inutiles ; sous les applaudissements nous rejoindrons notre dernière loge où les amis (proches ou inconnus) viendront nous offrir des fleurs comme à notre sortie de scène.

Isabelle

Le théâtre populaire
Les citations de Jean Vilar m'inspirent la richesse du savoir ; le théâtre attire tous ces gens qui aiment apprendre, et apprendre, et qui restent là à écouter ; tous ces hommes qui se libèrent de leurs mots, de leurs cris de joie, de leurs peurs, qui se livrent sur scène avec bonheur, aux regards de cette foule qui inonde la salle et qui applaudit à la fin du spectacle.

« La culture c'est d'abord une entraide, pas une aumône. »
La culture n'est pas donnée à tout le monde, seuls ceux qui le veulent et ont vraiment envie d'apprendre y ont accès.
C'est aussi un don de soi qui se développe au fil du temps.
Chacun peut faire une entraide à l'autre qui n'a rien, cela se travaille ensemble. La culture pour mieux la répandre, ce n'est pas une aumône de donner de ses connaissances, mais de l'amour et du partage aux autres.

Marie

Les citations ne m'inspirent pas car n'en connaissant aucune… donc, je ne peux pas inventer, j'ai eu tort de ne pas en avoir lu au moins deux pour pouvoir en parler... dommage
Apprendre, toujours apprendre, c'est la deuxième chose que l'être humain doit faire car la première, c'est de savoir lire du théâtre et cela n'est pas simple.
De toute façon on apprend tous les jours, à tout âge, et c'est bien de savoir pas mal de chose. Savoir, c'est intéressant surtout à notre époque.
Avec les ordinateurs, Internet, on découvre le monde. Assis sur sa chaise, en un clic, on se retrouve à l'autre bout de la France.
Apprendre c'est aussi parler d'un peu de tout, de s'aider les uns les autres, découvrir le mode de vie.
Apprendre, c'est sortir du cocon où l'on s'enferme petit à petit.
Et le théâtre ? C'est un peu tout ça, surtout rire et pleurer !

Josette

Le théâtre, qu'il soit populaire ou élitiste, n'est pas un apprentissage mais un divertissement ou un mode de transmission culturelle.
En tant que divertissement il fait appel à nos propres expériences ou fantasmes face à des situations données, il inspire de la réflexion.
Culturellement, il maintient une tradition, un mode de vie. Pour cela il est le garant d'une connaissance et d'un mode de pensée.
Il peut aussi être parfois un moteur de propagande et d'endoctrinement. L'ignorance du peuple est la force su pouvoir.
Apprendre c'est découvrir, seule l'expérience l'offre.

Patrice

Tous, chacun, ensemble solidaire, responsable. Il n’y a pas de dichotomie. Il n’y a pas le dedans opposé au dehors, les acteurs ne sont pas isolés du public. J’ai un souvenir précis d’une pièce de théâtre à Gennevilliers où la scène et le public étaient imbriqués. J’ai aussi les sensations nocturnes d’un spectacle itinérant en pleine nature du côté de Montluçon.
Héros, anti-héros, princes, serviteurs, personnages auxquels on donne vie.
Là, j’ai le souvenir d’une tempête sur scène. Le groupe des acteurs courrait d’un côté à l’autre de la scène de manière si homogène que j’avais la sensation d’être sur un bateau ballotté par les éléments.
Ecouter, éduquer, apprendre, comprendre et vivre le théâtre comme on vit sa vie. Je me revois encore à la radio locale de Montluçon. Une fois par semaine j’animais une émission de musique classique. J’apprenais aux autres. Je m’enrichissais moi-même.
Amitié, autre, humanité, respect, tolérance. La culture c’est cela aussi, écouter, tenter de comprendre l’autre.
Travailler, travailler encore ; même les impros se travaillent. La création n’est pas un don. Quoique l’on fasse, peindre, écrire, composer de la musique, il y a toujours du travail, de l’application, de l’autocritique.
Regard du public, réactions, renvois, retours. J’aime le silence qui s’installe durant ce temps infime entre la fin d’un spectacle et celui des applaudissements. C’est comme si on franchissait cette porte magique entre l’œuvre d’art et son public. Applaudir, acclamer donne vie à ce qui n’est au départ que des mots sur une feuille, des notes sur la portée.
Extinction des feux de la rampe, grand jour, rue, off. Et après ? Hier soir, je finissais la lecture d’un roman qui m’a captivé (Home de Toni Morisson). A l’instant où je refermais ce livre, où je l’ai posé sur ma table de nuit j’ai ressenti le regret de quitter cet univers et ces personnages. Il me semblait que je les délaissaient tant ils avaient pris de la place dans ma vie.

Dominique

J'ai une petite aumônière, elle est toujours accrochée à ma ceinture, je la sens me rappeler sa présence s'il m'arrive de courir après le temps.
Son velours jadis brillant et soyeux est maintenant terni.
Peu importe son cordon, gardien de ses trésors enfouis, qui s'ouvre et se ferme au rythme de ma voix ou de mes pensées. Avec elle, je ne suis jamais seule.
Mais que contient-elle ?
C'est un secret !
Essayez de deviner !
Que peut-on dissimuler dans une aumônière ? Je devrais dire « amasser », non, je n'ai pas dit « classer »...
Je vous sens l'esprit en ébullition !
Vous pensez de l'argent, des écus, des euros, des pièces d'or, du papier monnaie.
PERDU !
Alors, réfléchissez ! Que peut bien avoir besoin l'homme, si ce trésor ne fait pas de bruit, ne peut être volé ou détruit ?
Mon aumônière contient … contient... Elle contient un trésor dont j'ai hérité chaque jour.
Elle contient mes mots, mon savoir, ou celui qui en reste – j'en ai perdu beaucoup en ne le protégeant pas – elle contient mes images, celles que j'ai réussies à comprendre et à préserver et qui se sont imprimées dans mes rêves.
Elle contient aussi mes doutes et mes maux, ceux-ci forment un ensemble et ne se séparent jamais. Ils sont accrochés, blottis les uns contre les autres et seront à jamais perdus si je me noie dans certaines de mes arcanes.
Mais je soupçonne mon aumônière d'avoir un fond sans fin qui emmagasine, qui me permet de piocher au gré de mes incertitudes, de retenir, d'exister, de me faire plaisir et peut-être d'être moi-même.
Quelquefois, j'ai même pensé qu'elle aimait à me tester. Il arrive qu'elle substitue certains de mes choix, afin de vérifier si je ne triche pas.
Elle s'est investi comme la gardienne de la richesse et de la liberté que m'offre le théâtre de ma vie.

cgh

Jeudi 11 Octobre

Consigne 1 :

En prenant exemple sur les poèmes de Robert Desnos : Le Ver luisant, L' Hippocampe et L' Escargot, écrivez en rimes et en dix lignes sur des animaux.

La Morue au sel

Une morue baille dans un seau.
La voilà toute trempée dans l'eau.
Le sel est au prix fort, se dit-elle, ennuyée,
Pourquoi ce trempage de longue durée ?
Va-t-on sortir de mon corps (sage)
Tout le sel de la mer, essorée ?
- Et oui, lui dit la méduse médusée,
Je connais quelqu'un au môle,
Un ancien matelot de passage
Qui, une fois que la morue est molle,
N'a plus de mal à la digérer !

La Belette coquette

- Bonjour, petit belette
Je vous trouve bien jolie.
- Chère Dame Tortue, ma robe proprette
Sort tout droit de Monoprix.
- Tiens, lui dit le canard,
Je croyais qu'il y en avait marre
De ne porter que des soldes.
- J'ai dit ça ? lui dit la belette,
Je suis pauvre, je vous l'accorde !
Mais demain, quand sonnera midi,
Je pourrai encore me payer du canard farci !

Claudette

 

Madame la fourmi
Dans son trou riquiqui
Semble s'activer à porter
Des grains qu'elle doit rapporter
Passant par des galeries
Où tout semble gris
Un va et vient permanent
Ressemble à un régiment
Où ordre et discipline
Évite la famine


Perroquets des îles
Jacasse sur son nid
Il distribue des paroles
En dansant une ronde folle
Déployant ses plumes lumineuses
Où lumière et soleil les rendent radieuses
Le ballet, paroles disparues
L'oiseau semble perdu

Annie P

 

Allongé sur une branche, tu es là
Joli petit koala !
Tu dors profondément
Mais en te caressant
Tu ouvres un œil, puis deux.
Tu nous regardes, gentiment, entre deux
Comme si tu voulais nous dire :
« Laissez-moi tranquille ! Laissez-moi dormir ! »
On te laisse avec regrets, pour un moment,
On aurait voulu te caresser plus longtemps !


Dans ton délire tu sautes, tu cries, joli petit singe.
J'aimerais bien te prendre par la main
Mais tu ne veux pas, tu prends mon sac à main !
Tu fouilles, tu te regardes dans la glace,
Et je ris de te voir faire le « singe », et tu casses
Mon miroir, tu essaies de grignoter
Mais tu préfères bien sûr sauter !
Et bananes, cacahuètes manger !
Et de branche en branche grimper !
Je t'adore petit singe malin !
Tu es si intelligent et si fin !


Où cours tu ainsi souris, petite souris ?
Tu files entre les pieds pour entrer dans un trou de souris.
Tu emportes avec toi
Des miettes de je ne sais quoi.
En auras-tu assez pour ton dîner de ce soir ?
Reviendras-tu dans le noir ?
Furtivement, tu grimperas quelque part,
Certainement dans un placard !
Comme tu es venue tu repartiras :
Tout en silence, et à ta faim tu mangeras

Paulette

 

Bz Bz Bz
Fait le moustique
Dans mes oreilles
J'en perds le sommeil.
Il m'énerve et en plus il me pique.
J'agite les bras dans la nuit
Et lui, chaque fois, s'enfuit.
Je me cache entièrement sous mes draps,
J'ai trop chaud mais il est encore là.
Bz Bz Bz
Saleté de moustique.
Pschitt, Pschitt, Pschitt
Fait mon anti-moustique
Qui va gagner.
Je vais me recoucher...
Non mais...


Dans le fond d'un panier d'osier
Un petit museau noir apparaît
Les moustaches frémissantes
Les oreilles dansantes
Et deux grands yeux
Tout ronds, tout bleus
Tu pousses de grands « Miaou »
Tu as l'air perdu, un peu fou
Tu te blottis dans mes bras
Et te laisses caresser
Mais tu ne viendras pas dans mes draps
Tu me plais mais inutile d'insister
Tu as ton panier d'osier
Allez, va ailleurs ronronner
Laisse moi sommeiller


Au loin d'abord, un souffle... immense jet,
Puis un dos majestueux, énorme, noir apparaît,
Enfin, la queue qui claque sur l'eau
Sur un rythme de cachalot.
Danse lente sur la mer plate,
Hissez haut, marins et pirates,
Si vous voulez le rencontrer
Soyez humbles et discrets
Pour faire un brin de mer à ses côtés.

Anny B

 

Le Coq chantant

Le coq chantant chante le matin.
Tu réveilles tous ces gens,
Aux aurores tu t'égosilles.
Dans le poulailler tu dors
Et, au lever du soleil, tu chantes
À nouveau : Cocorico ! Cocorico !
Tes cris réveillent tous les enfants,
Tous les beaux enfants dormant.
Cocorico sur cocorico, cri sur cri,
Coq chantant encore tu chanteras.

Le Chat

Est-ce que le temps est beau ?
Se demandait le chat.
Mais, voyez-vous,
Quand je me lave, fais ma toilette,
Il va pleuvoir.
La nuit, on dit, les chats
Sont gris.
Toutes ces choses je les sens.
Quand ma maîtresse me voit
En train de lécher
Mes pattes elle sait comment
Faut s'habiller.
Si elle doit sortir
Sans parapluie ou pas.
Le chat est caché ? Il ressortira !
Le chat ? On le chérira !

Le Chien

Beau ! Beau ce chien Bernard,
Chien sauveur de l'Humanité, chien recherché
Qu'aucune personne n'a pu adopter,
Qu'aucun humain n'a aimé.
Ouaf ! Ouaf ! Ouaf ! Ouaf ! Pour le chien.
Beau, beau ce chien Bernard.
Autour de son cou un collier,
Il porte un tonneau avec de l'eau,
Avec elle les gens sauvés seront là.
Ouaf ! Ouaf ! Ouaf ! Ouaf ! Pour le chien Bernard.

Marie

 

La « chiote » - Isis de Lisa

Isis à qui l'on fait des bises
Isis, c'est ma chienne
Qui est mienne
Isis que j'adore
Quand elle dort
La chienne qui est à moi
Me lèche les doigts
Isis la chienne la plus petite du monde
Ma chienne qui de sa hauteur
Nous regarde avec grandeur
Elle dort le soir
Autour du coup comme un foulard

Le corbeau

Le corbeau, un oiseau
Qui vole tout en haut
Un oiseau qui n'a pas d'arrêt
Dans tous ces trajets
Un oiseau qui vole à tire-d'aile
Sans se soucier d'un pays fidèle
Le corbeau vole, vole
Et rencontre d'autres oiseaux

La souris

Ma souris est blanche
Comme les ailes d'un ange
Ma souris est en cage
Comme pour un voyage avec bagages
Ma souris avec ses quatre pattes
Et son fil cherche à se débattre
Cette souris malheureusement partie
Est-ce qu'une souris
Fait comme les humains quand elle sourit ?

Josette

 
 

Le papillon

Qu'il est beau le papillon
Avec ses ailes multicolores
Il vole à la belle saison
Celle que les vacanciers adorent
La fleur l'attire comme une amante
Il la caresse de ses ailes
Et quand près de lui le vent chante
Il danse au son de sa ritournelle
Qu'il est beau le papillon
Avec ses ailes multicolores

Le rossignol

Son chant est pur
Quand s'est couché l'azur
Dans l'obscurité il nous rassure
Comme un espoir de meilleur
Il donne l'illusion du bonheur
À ceux qui rêvent d'un ailleurs
Et si le rossignol un instant cesse
Sa mélodie enchanteresse
Cette nuit qui ne finit pas
Comme un voile tout d'un coup s'abattra

La souris

Elle grignote doucement
Elle trottine sagement
Le chat l'attend patiemment
Il ne sait pas qu'il perd son temps
Car la petite souris grise
N'est pas une fille soumise
Elle se rit des dents pointues
De son ennemi moustachu
Qui veut la dévorer toute crue
Elle lui crie : « Turlututu, tu m'as pas eue »


Isabelle

Prendre exemple sur des niaiseries
Qu'elles soient végétales ou animales
Ne peut faire dire que des conneries
Mais en aucun cas du mal
Vert luisant, hippocampe ou escargot
Rebellez-vous contre l'intrus
Qui, ne respectant pas votre incognito
A fait de vous des plus valus

Patrice

 

Consigne 2 :

En compagnie de Robert Louis Stevenson grimpez au cerisier et décrivez, en rimes s'il vous plaît, ce que vous voyez.

Grimper au cerisier ? qui peut bien -
C'est moi, le bambin.
J'ai pris la malle dans mes deux mains
Et scruté les pays lointains.

Grimper au cerisier, qui peut bien le faire ?
C'est moi, le bambin de la rue.
J'ai pris la malle dans mes deux mains menues
Et scruté les pays lointains de la Terre.
Là, il y avait plein de monde
Et des animaux, peaux de chagrin.
Là, j'ai vu des mers si profondes
De loups et de requins,
Que j'ai couru le long des plages,
Des bords de mur, et de ravins
Pour égayer le paysage
Qui se noyait sous le crachin !
Grimper au cerisier ?
Je sais faire !
J'ai bon pied et bon œil !
La Terre n'est plus à refaire,
Demain j'en ferai mon deuil.

Claudette

 

Grimper au cerisier ? Qui peut bien -
C'est moi, le bambin.
J'ai pris la malle dans mes deux mains
Et scruté les pays lointains.

Et tout regardé.
Les oiseaux qui volent tout en haut.
Ces rues à perte de vue.
Tous ces gents petits et grands.
Les arbres grands et aussi géants.

Du haut de ce cerisier
On a aussi l'impression de voler.

Les montagnes aussi hautes que les nuages,
Ces chemin qui ressemblent à des serpentins.
Toutes ces autos en formes d'escargots.

Je descends du cerisier
Pour mieux voir et observer.

Josette

 

Avec tes champs à perte de vue
Quelle belle route parcourue !
Parmi les orchidées resplendissantes
Je rêve devant ces magnifiques fleurs.

Tes rues grimpantes,
Ta mer longeante,
Quel beau tableau
Tu fais San Francisco !

Et toi, Grèce de mon cœur
Doucement tu meurs,
Ton Acropole survivra,
Mais à quel point tu tiendras !

Devant tes pyramides,
Sous une chaleur humide,
Je pense à ceux qui, sous un éclatant soleil,
T'ont construite et quelle merveille !

Paulette

 

Grimper au cerisier ? qui peut bien -
C'est moi, le bambin.
J'ai pris la malle dans mes deux mains
Et scruté les pays lointains.
Sur un âne dans les chemins
À travers les Cévennes
Je promène ma peine.
Sur une goélette, je pose mon bagage,
Mes pieds foulant d'autres rivages.
Les vahinés pour moi dansent mille promesses
Et s'enfuient en riant assister à la messe.
Puis l'ancre dans une baie du Japon on jette,
Visages figés et tristes des Nippons.
Oh ! Doux sourires de mes princesses polynésiennes.
Pourquoi avoir laissé glisser vos mains le long des miennes
Dans l'adieu que déjà je regrette.
Pour ce soir je referme cette malle,
Les yeux, les mains
Mes souvenirs me font si mal.
Demain, peut-être demain.

Anny B

 

Grimper au cerisier ? Je sais.
C'est moi, la sœur aînée ;
J'ai pris mon panier par le bras
Et secoué les branches plus bas
Pour faire tomber ces cerises-là !
À côté, les autres ramassaient,
Moi, je m'évadais dans le ciel ensoleillé.
Le vent soufflait dans mes cheveux agités,
M'empêchait de regarder au loin cette fumée.
À l'horizon je voyais les nuages arriver,
Le temps se gâter.
Je descendis de l'arbre avec mon panier,
Je m'en allais de l'autre côté
Pour voir le village éloigné.

Marie

 

Sans avoir traversé les Causses
À pied et accompagné d'un âne
Je crois pouvoir dire sans états d 'âme
Que quiconque veut réviser à la hausse
Son regard sur ce paysage somptueux
Ne choisira pas un cerisier à dessein
Trop fragile, cet arbre au printemps majestueux
Ne pourra en aucun cas satisfaire son destin
Car ses branches fragiles à la beauté sans égal
Ne le laisseront pas surplomber l'Aigoual

Patrice

 
 

Grimper au cerisier ? qui peut bien -
C'est moi, le bambin.
J'ai pris la malle dans mes deux mains
Et scruté les pays lointains.

J'ai vu des jungles, des forêts,
Des mers, des océans et des ruisseaux.
J'ai vu des nuages qui coiffaient
Les montagnes, les collines et les coteaux.

Il y avait des formes immobiles
Les bras levés pour recueillir le soleil.
Il y avait des oiseaux en file
Qui courraient pour rejoindre le ciel.

Les fleurs à l'arc-en-ciel se mariaient,
Leurs couleurs dans leur violence soudain m'aveuglaient.
Alors, je suis descendue du cerisier
Tandis que ses feuilles virginales lentement m'enveloppaient.

Isabelle

 



Jeudi 18 octobre

Consigne 1 :

En utilisant des couleurs, tel un peintre devant sa toile, décrivez sur la page blanche une ville ou un quartier.

La maison ocre avec sa porte marron se dresse au bord de cette route grise.
Les pylônes, gris aussi, soutiennent un éclairage blanchâtre qui zèbre la nuit bleu marine.
À côté, à quelques mètres, la terre beige accueille les boulistes dans leurs vêtements d'été. Le jaune côtoie l'orange, le rouge se marie avec le bleu.
Les arbres encore verts offrent leur écorce marron au dos des promeneurs fatigués, le bout rougeâtre de leur cigarette danse dans la semi-obscurité telles des lucioles.
Un chien noir et blanc essaie d'attraper le cochonnet, qui n'est pas rose, et se fait houspiller.
Un enfant, tout de turquoise vêtu, ramasse des prunes violettes. Sa maman, près de lui, semble un ange dans sa robe azur, ses cheveux blonds formant un halo autour de son visage.
Le papa, militaire dans son treillis kaki, leur adresse un dernier regard de ses beaux yeux bleus tristes. Demain, il sera parti pour un de ces pays où le sable blanc recouvre la vie.
L'enfant ferme les yeux et le noir enveloppe le tableau qui se tient devant lui.

Isabelle

Le quartier où j'ai grandi avec son ciel bleu et parfois gris, et surtout les nuages blancs que j'aime.
Ce quartier que j'aime bien est surtout gris de part ses bâtiments. Le vert pour ses plantes, le rouge pour ses coquelicots l'été. Maintenant, avec les nouvelles résidences il y a de la couleur, ce qui rehausse un peu le quartier.
Il y a aussi du marron pour les arbres. Et plein de couleurs pour toutes les voitures qui maintenant ont plusieurs teintes qui vont du bleu au jaune et du noir au blanc. Les couleurs c'est vivant, gai.
J'oubliais les toits, couleur brique. Il y a aussi les pharmacies avec leur enseignes verte ou rouge pour nous indiquer leur emplacement.
Bref, si je regarde ce quartier, c'est pas les couleurs qui manquent.

Josette

De cette terrasse où j'ai mis mon rocking-chair je peux apercevoir les quelques toitures qui accrochent la lumière : une pincée de briques roses, quelques ardoises. J'ai l'impression quelques fois, en plissant les yeux et en humant mon café du matin, d'apercevoir l'Italie : un dôme blanc malgré le ciel aujourd'hui gris.
De-ci de-là, comme incongrus, quelques volets bleu turquoise qui rappellent la Tunisie. Ce sont sûrement des gens qui revenus d'orient, nostalgiques de leur voyage ont utilisé quelques bribes de ce bleu sacré.
Tout d'un coup, d'un poste de radio lointain, la bande FM fait échapper la chanson consacrée à ma ville « Toulouse » de Nougaro. Puisque cette ville est la fleur urbaine la plus fragile. Rose est ma ville, mon quartier et toutes mes pensées.

Jessica

Ambiance jaune soleil pour le ressenti général. Éclats en pointillés des fleurs blanches, orangées, bleues posées le long des rues ; rouge flamboyant pour l'arbre du même nom qui se découpe sur un ciel d'un bleu parfait ; déhanchés colorés des vahinés sillonnant les étals d'un marché où se mélangent toutes les nuances de l'arc-en-ciel, rehaussées par les odeurs de vanille, d'ananas, de mangue, de tiaré, d'ylang-ylang.
Ambiance Pacifique, sourires illuminés, fleurs délicates au dessous de l'oreille, nonchalance d'une ville du bout du monde.
Papeete, village-capitale de la Polynésie Française. Je ferme les yeux et j'erre au gré de tes rues animées telle une voile poussée vers la douceur de tes rivages.

Anny

 

Bleu comme le ciel
Blanche comme les alizés
Noire comme les nuages d'orage
Arc-en-ciel comme pendant une averse
Turquoise la mer
Rouges les langoustes au grill
Blanc le sable de la plage
Noires les belles nuits étoilées
Verte la végétation luxuriante
Multicolores les habitants gracieux
Rouge était mon hamac
Posé sur cette île aux multiples couleurs

Patrice

 


Consigne 2 :

Commentez le tableau d'Auguste Chabaud "Les Arènes"

À première vue c'est le côté « noir » du tableau qui frappe, mais, en prenant le temps d'observer cette peinture, on peut voir une arène dont la perspective étouffante et impassible semble traduire un malaise chez le peintre... les personnages autour de lui et face à lui ont peu d'importance, ils n'ont pas de visages, les plus proches sont presque caricaturaux, seule l'arène semble « ensoleillée » mais on n'assiste pas là à une corrida, il semble qu'il y ait plusieurs personnages entourant un taureau.
C'est un tableau plus suggestif que représentatif, il traduit une atmosphère pesante, le peintre, en retrait, dénonce l'absurde de ce qu'il voit, et au milieu de ces couleurs sombres un trait rouge semble gicler comme le sang du taureau à la mise à mort... mais cette supposition est mienne, à chacun son ressenti.

Anny

Ce tableau représente une arène et ce taureau face à la mort. Bien sûr une corrida avec ces murs jaunes et ces porches noirs, tous ces gens qui crient : « Olé, olé ». Je vois aussi tous ces spectateurs avec leur canotier couleur jaune et un bandeau noir.
Il faut dire que les couleurs sont assez tristes, mais à force de le regarder on doit voir ce que le peintre voyait lui-même : cette arène qui est ronde et donc, toutes ces personnes qui se voyaient face à face.
Si je me mettais dans le centre de l'arène et que je regarde tout autour de moi j'apercevrais tous ces visages qui ont les même expressions : sourire – cris – applaudissements. Et surtout, qui sont contents de passer une bonne journée.
Que dire de ce tableau, il faudrait avoir la vision du peintre lui-même pour le savoir.

Josette

Je ne possède aucune culture artistique, ignorait l'existence de Mr Chabaud et n'ai assisté qu'à peu de corridas. Cependant le souvenir que j'ai de ce spectacle est une myriade de couleurs et de soleil. C'est un jour de fête.
Ce tableau, sombre et presque sinistre ne reflète pas l'ambiance festive qui anime ces manifestations.
Vive Goya, Dali, Picasso.
En gros, je le trouve nul (Chabaud) !

Patrice

Ils sont là, devant moi, tous ces aficionados qui hurlent des « olé » à tour de voix.
Ils sont venus voir le taureau, voir les hommes tournoyer. Ils se sont coiffés de leur canotiers.
J'aimerais les prendre en photo mais je n'ai pas mon appareil sur moi. Alors, je les peins dans ma tête.
Celui levé au premier plan me cache le visage d'un autre, l'ombre m'empêche d'être précis sur leurs traits. La foule au loin n'est qu'un amas de têtes et de bras qui gesticulent.
Dans l'arène je vois le taureau qui, bravement, combat ces pantins qui s'agitent autour de lui dans une danse sans musique.
Le sable jaune, assorti au canotiers (ou est-ce l'inverse?), attend que le sang rouge coule pour l'abreuver.
Le ciel est sombre. Je ne sais pas vraiment pourquoi je veux immortaliser cette scène tragique.
C'est une tradition dans cette région que ce combat inégal entre l'homme et l'animal. Parfois, c'est ce dernier qui gagne, mais le plus souvent c'est le combattant armé de piques et d'épées.
Pour toujours cette image existera. Même après sa mort le taureau continuera le combat.

Isabelle

J'avais dans mes souvenirs d'enfance sur mon grand-père une image récurrente : c'était ces après-midi qu'il passait à la corrida.
Il se mettait dans les derniers gradins avec son chapeau de toréador espagnol et il contemplait pendant des heures l'arène remplie de bruit, d'odeurs et de souffrance. Je ne comprenais pas ce qu'il trouvait à ce spectacle bestial, alors je me mettais à côté de lui, écoutais sa respiration et observais les couleurs que ce spectacle m'offrait.
Je me rappelais du soleil qui brûlait mes paupières, le rassemblement de ces petits canotiers serrés les uns contre les autres qui hurlaient ensemble comme un seul homme « Olé ».

Quand on a douze ans on fait feu de tous bois. Ce rugissement mêlé de tous ces cris me semblait le summum du symbole masculin. Je reproduisais les mimiques et la gestuelle de mon grand-père, croyant être entré dans le secret des rois.
Maintenant que j'ai quarante ans et je souris de mon 1,80 mètre. Mais la corrida sera toujours ma madeleine de Proust et j'aurai toujours dans le creux de ma mémoire cette image de mon grand-père en conquistador comme une vieille photographie fanée.
Chacun ses souvenirs.

Jessica

 

Jeudi 25 Octobre

Consigne 1 :

Un beau jour, la nouvelle tombe : l'étang de Thau a disparu. Quelle est votre réaction ?

En général, ce genre d'événement, s'il survient, prend des milliers d'années !
Ma réaction est donc hypothétique.
1ère cause : le ralliement à la mer, la montée de la Méditerranée qui l'a ingurgitée et qui sous entend une bonne partie de la disparition de Sète, dont la ZUP.
2ème cause : le réchauffement qui fait s'évaporer l'étang. Improbable, l'évaporation serait telle qu'il pleuvrait des trombes d'eau, d'où reformation de l'étang.
La disparition la plus grave ne me semble pas l'étendue d'eau, peu vraisemblable à court terme mais celle de la faune et de la flore.
Il me semble qu'en ce sens les artisans et professionnels qui en vivent sont conscients de leur devoir pour assurer le futur de ce site. Faisons-leur confiance

Patrice

La nouvelle tombe, et moi aussi !
Bien sûr, plus de repère, plus d'eau. Quel malheur. Donc, plus de poissons, les bateaux en cale sèche. Fini les crustacés.
Un étang sans eau ça ressemble à un grand puits vide. Je pourrais marcher à l'aise aux milieu des algues car l'étang – ou la mer – a toujours été pour moi un mystère.
Pour pénétrer au fond de l'étang il faut des masques à oxygène. Mais l'étang vide, plus besoin de rien.
Pour moi il y aurait un grand manque, l'étang est autour de nous depuis la nuit des temps. Il fait partie de Sète et aussi de notre vie.
Je ne me vois pas me réveiller un matin et être aussi en cale sèche. Et les pêcheurs serait en dépression car c'est aussi leur gagne-pain.

Josette

Ma réaction à cette annonce me laisse pensive ; la nouvelle tombe si froidement qu'on ne peut s'imaginer une telle disparition, on y croit pas, faut aller voir sur place.
Où sont passés tous les bateaux. C'est une catastrophe pour les poissons qui en défaut sont morts ; et les emplacements avec leurs filets pour attraper les moules ; et les huîtres sont par terre, sans l'eau qui s'est faite avaler par la terre et attirer au fond. Tout est sec au sol, des fissures apparaissent à cause de la sécheresse.
Que vont devenir tous ces gens qui travaillent et vivent de ça. Plus de travail, plus d'argent.
Faute au réchauffement climatique la terre a soif, et nous trop chaud, il faut préserver la nature en économisant l'énergie que nous dépensons sans compter, peut-être. Dommage.
Dame nature qui était si belle est partie, que va-t-on devenir sans l'étang, son attrait pour tous ces gens qui viennent le voir, se baigner, le fouiller pour ramasser ses trésors que sont les coquillages et autres poissons généreux.
« Cela se peut pas », disent quelques uns ! D'autres ajoutent : « Y a qu'à le remplir d'eau pour le grossir et le maintenir ».
Certains n'y croient pas et persistent à dire que c'est un poisson d'avril à l'avance, d'autres disent : « C'est un euphémisme ». Pas drôle du tout.
L'Étang de Thau ne disparaîtra pas de sitôt.

Marie

L'étang a disparu, s'est-il évaporé ?
Toute cette étendue bleue qui servait de « terrain » d'élevage aux ostréiculteurs, sont-ce les huîtres ou les poissons qui l'ont bue ?
Ces bateaux qui raclent un fond désolé qui va les remorquer ?
Mes yeux vont devoir se déshabituer de cet horizon confondue avec l'eau.
Mais, surtout, que va-t-il se passer pour tous ces gens qui vivaient grâce à l'étang ? Où vont-ils trouver leur gagne-pain ? Et que vont-ils faire de leurs huîtres, moules et poissons qui n'ont plus d'endroits où grandir et où manger ?
Les bateaux qui promènent les touristes, où vont-ils aller ?
La faune et la flore sont si riches que leur perte est une calamité.

Isabelle

Après une nuit mouvementée, j'ouvre enfin ma fenêtre, et oh stupeur ! je n'ai plus la même vue, face à moi. J'en sursaute et je suis dans tous mes états !
Plus de bleu au loin, plus de belles étendues marines à portée de la main. Ce cadre enchanteur, à l'iode cristalline peut-il avoir été absorbé par un énorme cataclysme dans la nuit ?
Déjà, au loin, j'imagine mon étang s'étouffant de rage avant de disparaître dans un enfer glouton et tumultueux.
Oh ! Mes yeux que j'écarquille ne me laissent rien entrevoir que des pauvres coquilles mortes. Hélas, aussi les jolis poissons !
Alors, cette eau tant de fois décriée à cause de sa mauvaise odeur l'été, son bras de « poulpe » accroché à la mer serait partie, comme par enchantement sous un désert de vase ?
J'allume fébrile la télé et j'apprends par elle et en boucle sur toute les chaînes que la Méditerranée, fâchée, a reculé d'un coup, en emportant sur son cou, l'étang de Thau, devenu fou !
Et je m'éveille vraiment soulagée de ce mauvais rêve.

Claudette

L'étang de Thau : merveille des merveilles avec ses tables bien alignées, ce rivage qui la borde ponctué de ces petits ports ou villages pittoresques. Et ses voiliers naviguant au gré du vent et parfois se groupant autour d'une régate.
Comment imaginer Sète sans son étang ? Et pourtant...
Lors d'une soirée au Théâtre de la mer, un grand magicien nommé Majax est venu en représentation. Au cours de son spectacle il a annoncé que dans les vingt-quatre heures à venir il allait faire un numéro unique et que nous apprendrions une nouvelle époustouflante. Une disparition, un phénomène hors du commun !
Quelle ne fut pas ma surprise à la lecture du Midi Libre : gros titre annonçant la disparition complète de l'étang de Thau !
Je fis de suite le rapprochement avec l'annonce insolite de la veille par Majax. Était-ce possible ? Je me précipitai vers l'étang et, désespoir, il n'y avait ni eau, ni bateau, ni table, enfin, le désert ! Comment cela avait-t-il pu arriver ? Comment un tel site avait pu ainsi disparaître corps et âme, si l'on peut dire...
Une tristesse immense m'envahit. Je pensais à ces merveilleux couchers de soleil qui se miraient sur cette étendue d'eau, à ces parties de pêche à la turlute, aux éclats de voix et de rire qui résonnaient sur le bateau, enfin à toutes ces beautés et ces loisirs que nous offrait ce merveilleux site. Ce n'était pas possible que nous en soyons privé ainsi. Un flot de sanglots m'envahit et je sentis une main sur mon épaule, une voix me murmurant : « Réveille-toi, tu fais un cauchemar ».
En ouvrant les yeux je vis mon fils à côté de moi et je compris. Quel soulagement. C'était un mauvais rêve. Les tours de magie de la veille avaient dû faire travailler un peu trop mon imagination.
Je me préparai rapidement et sautai dans ma voiture, direction l'étang. Il était là, bien à sa place. Le soleil l'illuminait. Je pus le contempler et l'apprécier à sa juste valeur.

Maryse

Consigne 2 :

Votre ami l'hippocampe vous raconte sa vision du fond de l'étang de Thau, avant sa disparition.

Moi, l'hippocampe en voie de disparition ! Je suis tellement discret qu'il serait présomptueux de l'affirmer. Depuis le temps que j'existe et que moi, papa, porte mes petits sans que personne ne comprenne.
À qui faire confiance ? Aux terriens ? Bof ! Ils ne connaissent pas 20% de mon univers, de ce qui fait mon quotidien. Les algues qui m'abritent, les aliments qui me nourrissent.
Je ne suis pas un voyageur, c'est ce qui me vaut d'être harcelé ou pêché par mégarde ou convoitise. Mais c'est aussi ma force, je connais mon terrain de jeu et depuis des milliers d'années de ruse et de cache-cache je survis.
Certains me croient légende ou imaginaire, qu'importe je suis là et compte y rester.

Patrice

Si tu savais, me dit Hippo, ce qu'il y a au fond de cet étang. Il y a de si beaux coraux. Des sargasses qui sortent de l'eau leur tête fière. Des anémones, des blennies et des gobis.
Des méduses si belles qu'on les voudrait pour ombrelle, telle la lumineuse Aurélia.
Il y des laitues, des huîtres, des moules, des palourdes qui ne sont pas si lourdes sur le dos d'un camion qui transportait peut-être du poisson mais qui maintenant est décoré d'anchidies.
De temps en temps je vois des grosses nasses qui raclent pour ramener leur provision de coquillages devant les yeux d'un crabe énervé, voire enragé.
Il y a ces couleurs qui attirent : rouge, vert, bleu, blanc.
Et il y a moi qui me promène, tel un cheval libre de rênes, horizontalement ou verticalement

Isabelle

Mon ami l'hippocampe me raconte bien des choses du fond de l'étang. Il ne sait pas la chance qu'il a. Il me parle de l'eau, tantôt froide, tantôt chaude.
L'hippocampe me demande d'aller avec lui au fond de l'étang, donc je le suis. D'abord, les palmes et le masque ; et nous voilà dans cette eau immense. Il me fait signe de regarder à droite et à gauche. J'ai l'impression d'être en apesanteur. Je trouve qu'au fond de l'étang je suis relaxée car l'eau me porte. Me voilà au fond. L'hippocampe me fait signe de le suivre, il n'y a pas un seul bruit, j'ai l'impression d'être seule. Toutes des plantes de toutes les couleurs, tous ces poissons qui nagent dans tous les sens. L'hippocampe me fait comprendre les dangers des gros poissons qui mangent les petits.
Mon ami descend de plus en plus profond et je ne vois plus la petite lumière qu'il y a au-dessus de l'eau. Tout est sombre, cela me fait peur, mon ami le ressent, il remonte. Je commence à voir des ombres, des algues, les crustacés, et voilà la surface. Je suis plus sereine.
L'hippocampe me dit : « Au revoir, à bientôt ».
Comment reconnaître cet ami du fond de l'étang ? Il me fait signe que lui me reconnaîtra. Tant mieux.
Alors, à bientôt.

Josette

Ma pauvre, me dit mon ami l'hippocampe, si tu avais vu avant : des papiers toilettes flottaient, des sachets plastiques tombés des bateaux, jetés dans l'étang, du mazout dont on voyait des nappes qui nageaient. J'avais des nausées abondantes, quelle odeur, je m'étouffais et sortais ma tête hors de l'eau ; j'allais plus loin, c'était identique.
Certains poissons étaient déjà asphyxiés par la pollution. Les huîtres et les moules pourrissaient sur place, pas question de les consommer.
Que de déchets d'humains dans notre étang, cet étang si calme et beau était devenu insalubre et mortel.
Emmène-moi chez toi, me dit mon ami l'hippocampe.

Marie

Je suis celui né hors de terre dans le ventre bleu d'une « mère » qui m'a tout appris et tout donné.
Lorsqu'un jour elle m'a mis en pension libre dans l'étang de Thau où je fais depuis, sensation par mon équilibre, oui, venez ! Je serai votre guide, vous nagerez avec moi, nous irons labourer les champs d'algues et débusquant des petits poissons-chats.
A dos d'hippocampe, nous irons en nous ménageant d'attention au mur des oursins, en quête d'une surprise, celle d'un dauphin ! Avec lui, peut-être, une halte à Bouzigues au restaurant « la rade », vous y verrez la daurade s'attendrir au soleil !
Que dire des bouquets offerts par les crevettes roses, incomparables fleurs marines et du bavardage des « barbues » prometteuses de barbecue !
Je suis en mission perpétuelle dans mon étang favori.
Je fais la police. Je glisse un œil sur tout.
L'étang doit rester propre ! Il ne faut pas le polluer !
Je compte sur vous tous, sinon, je vais tirer la cloche pour vous le rappeler !

Claudette

Je me présente : je m'appelle l'« Hippocampe ». Je suis la fierté de l'étang de Thau, ma réputation n'est plus à faire... Ma modestie non plus !
Donc, vous êtes curieux de connaître les secrets, légendes et faunes de mon bel et grand étang. On dit qu'une église, voire un village dormirait au fond de l'étang. Mais, à ce jour, personne n'a été le vérifier, moi non plus d'ailleurs.
Le fond de l'étang est tapissé d'algues et herbes diverses, au milieu desquelles se promènent les loups et les daurades, les maquereaux, et nos célèbres « seiches ». Les plongeurs, à certains endroits, ramassent des huîtres sauvages et autres crustacés, dont les palourdes, très recherchées et combien délicieuses.
Ces fonds semblent parfois mystérieux pour les personnes étrangères à la région car un étang c'est de l'eau douce normalement, or là c'est la mer qui vient y amener son sel ! Aussi, n'hésitez pas à le découvrir et je me ferai un plaisir de venir vous saluer.

Maryse

 

Je suis un hippocampe missionnaire
Un cheval de mer ordinaire
Prêt à vous faire visiter
Les profondeurs bleues
De la Méditerranée
J'aime son écosystème
Et vous aussi serez heureux
De partir sans problème
Visiter en avant première
L'étang de Thau,
Mon père et mère,

Claudette