Les Textes de L'atelier Ecritures au Pluriel du mois de Décembre 2013

 

 

Jeudi 5 Décembre

Consigne 1 :

Comme Michel Delpech « chez Laurette », après le lycée, asseyez-vous derrière la vitre d'un café et parlez-nous de vos copains de classes et des gens qui passent dans la rue.

Après les cours je ne m'arrêtais pas au café, j'allais au café car le café c'était chez moi ! Je ne m'asseyais pas à une table, je passais derrière le bar. Bien sûr, j'y retrouvais mes potes de lycée, qui eux y jouaient au bowling, au flipper.
Parmi ce petit monde il y avait toujours quelqu'un qui se faisait remarquer, tantôt par des gesticulations, des paroles plus fortes, une tenue vestimentaire un peu décalée, comme ce grand brun qui portait toujours de grands manteaux avec les retours de manche et le bord du col bariolé ; un autre les cheveux longs style hippie, champion de baby ; il y avait aussi l'intello, le révolutionnaire.
Il y avait aussi des filles bien sûr, les unes brunes, les autres blondes, cheveux longs ou courts, bouclés, lisses. Elles avaient toutes un caractère bien à elles. Il y avait aussi des flirts aux sein de tout ce petit monde.
Quant à moi, je passais de table en table, tantôt pour servir un Orangina, une menthe à l'eau ; il m'arrivait aussi de m'asseoir et de discuter avec les uns et les autres, nous étions dans notre monde, nous étions assis sans rien voir ni entendre de ce qui nous entourait. Il est même arrivé que ma mère soit obligée de m'appeler plusieurs fois afin que je sorte de ce petit monde pour retourner au bar afin de lui venir en aide.

Jean

Dès que les cours étaient finis, ma meilleure copine et moi-même on descendait « en ville ».
Quelques instants après, un copain nous rejoignait. Grand, brun, et surtout, un clown. On s'asseyait sur un banc en pierre et, au fur et à mesure, d'autres connaissances arrivaient. Le sujet de discussion était surtout un cours précédent.
Le prof de dessin qui nous explique les perspectives et des tirs de craie à celui ou celle qui parle en classe.
- Moi, dit le copain, j'ai échappé à la brosse du tableau et je l'ai fait courir dans toute la classe, autour des chaises.
Un silence... puis : « Tu as vu Renée, elle s'est entiché de « Germain » ». Rires. « Ils ne vont pas bien ensemble. »
On se moquait des « mémés » avec leur toutou qui levait la patte sur la voisine avec qui elle parlait. Au moment de se quitter, on faisait la « rue Gambetta » dans un sens et puis dans l'autre, pour voir si celui avec lequel on avait « flashé » nous adressait un sourire ou plus, un mot. Puis, on partait, chacun de son côté en se disant : « À demain, même endroit ».

Francine

Je sors de l'école et je rejoins les copains et les copines dans notre bar habituel. Je commande un café, je discute de la journée de classe.
Le 1er copain rentre dans le bar avec un Ipod aux oreilles, il danse aussi. Il s'assoit en face de moi et me demande ce que je fais ce week-end, je lui réponds : « On verra ».
Dehors il pleut, les gens ont tous un parapluie – des grands, des petits – en couleurs. Il y a des personnes pressées, les voitures arrosent les passants en roulant vite.
Ma copine arrive, me fait la bise, me demande si tout va bien et, un quart d'heure plus tard, nous sommes cinq ou six à discuter des nouvelles tendances, des bouquins, des nouveaux films...
Ah, la pluie se calme, les pépins se ferment. La nuit commence à tomber, les lumières brillent et cela nous rappelle qu'il faut rentrer. On se dit au revoir, à demain. Sinon, on continue nos discutions mais ça, c'est privé, alors, à demain.

Josette

Enfin la sonnerie a retenti et je me suis éveillée de ce cours de maths qui m'ennuyait. Sylvie, Christiane et moi, on a dévalé les escaliers pour courir jusque chez « Paulette », ce petit café où nous avions nos habitudes d'après-lycée.
Sylvie, de sa voix douce et posée, nous parlait du garçon blond qui lui avait souri dans la cour. Elle était réservée et se demandait si, lui, allait l'aborder un jour.
Christiane et moi fûmes prises d'un fou rire quand nous vîmes à travers la vitre ce fameux blondinet qui cherchait à voir à l'intérieur. Sylvie ne douta pas qu'il la recherchait et devint cramoisie.
Krikri – le surnom que nous donnions à Christiane – papotait plus vite que son ombre. Elle enchaînait les mots si vite que l'on avait l'impression qu'elle ne finissait jamais l'un avant de commencer l'autre. Elle apostrophait souvent les gens en les tutoyant, sûre que, étant tous égaux, il ne devait y avoir aucune différence dans les termes employés pour s'adresser aux autres. Le problème, c'est qu'elle appliquait cette « règle » aux professeurs, ce qui n'était guère apprécié et lui avait souvent valu des heures de colle.
Tout en écoutant son débit mon regard se perdait dans la rue, de l'autre côté de cette vitre qui nous protégeait du vent rigoureux de l'hiver. Les gens étaient nombreux à courir les magasins en cette période de fêtes. Emmitouflés, ils ressemblaient à des fantômes noirs qui hantaient un purgatoire où ils se devaient d'observer les rituels imposés par la société de consommation.
Je levais les yeux vers le ciel où la nuit commençait à poindre. C'était ce moment de la journée entre chien et loup où la mélancolie vient pointer son nez. Je me tournais vers mes amies et leur souris, heureuse d'être à leur côté à siroter un chocolat chaud.

Isabelle

Consigne 2 :

Racontez votre 24 Décembre au soir en comparant avec celui de Michel Delpech en 1974.

C'est le vingt-quatre décembre, réveillon. Tout est prêt, les enfants sont excités, la dinde est cuite, les jouets empaquetés. À la télé on met tous les dessins animés, parce que Noël c'est pour les enfants.
Je m'habille avec une certaine élégance. La table brille, le sapin resplendit au milieu de la pièce. Tous le monde espère avoir un petit cadeau car les temps sont durs. On se raconte des histoires un peu abracadabrantes. L'église, non, car le temps d'habiller tous les gosses le curé est allé se coucher. On se dit : « un Noël de plus qui finit bien ». On languit de tout déballer, chacun prend un enfant. C'est l'heure des piles, car les jouets d'aujourd'hui c'est les piles ou les chargeurs. J'entends appeler : « Mamie, viens m'aider ! ».
Ça y est, Noël est fini. J'attends que tout le monde dorme et je prends la bûche glacée, je la mets dans la chantilly et je me dis : « Joyeux Noël, Jo ».

Josette

Une fois habillé correctement, il est temps de dresser une jolie table, jolie vaisselle, bougie, décor de guirlandes clignotantes, et allumer le tout dernier sapin aux couleurs actuelles.
En attendant les invités on sort les apéritifs dans des jolis plateaux, on vérifie que le chapon cuit doucement et on ouvre les coquillages.
Tout le monde est là ! La fête peut commencer. Une musique en sourdine, plus forte au fur et à mesure que les esprits s'échauffent.
À minuit, les enfants iront retirer leur cadeau sous le sapin et la distribution ira de pair avec les rires et les mercis.
Champagne, bûches glacées, petits fours, tout à volonté. Joyeux Noël et bonnes fêtes à tous.

Francine

Ce fut le premier réveillon sans la famille, juste nous trois. Nous avions paré le sapin de ses mille couleurs et de tous ses scintillements ; nous avions, avec ma fille, passé toute la journée à décorer, parer toute la maison de boules, guirlandes, étoiles, petites figurines, lumières et bougies.
Les cadeaux tout prêts et bien cachés, je suis parti avec ma fille faire quelques achats, de manière à l'occuper car elle bouillait d'impatience, ce qui permit à sa mère de finir de mettre les petits plats dans les grands. Nous avions décidé de faire les choses avec beaucoup de grandeur car, pour la première fois depuis sa naissance voilà bientôt quatre ans et demi, nous n'étions que tous les trois. Ce petit intermède permit aussi à sa mère de se parer comme une reine pour sa petite princesse. Au retour de cette petite balade il fallut s'occuper d'elle, la coiffer, l'habiller et la parer de mille éclats.
Je passe sur le menu et le repas, à la fin duquel il fallut utiliser mille stratagèmes pour la mettre au lit, car elle trépignait d'impatience, elle voulait voir le Père Noël. Elle voulait que celui-ci lui remette ses cadeaux. Après bien des négociations, elle finit par accepter de dormir à la seule condition que nous la réveillions lorsque le Père Noël serait là ! Quand elle ouvrit les yeux on était le vingt-cinq et le Père Noël était passé en laissant tout un tas de cadeaux sur ses chaussures au pied du sapin.
« Waouh », dit-elle en écarquillant les yeux.

Jean

M. Pokora va venir nous seriner une mélodie tirée de son « Robin des bois ».
On décongèlera la dinde au four à micro-ondes et on la fera cuire sur une plaque à induction.
Mais, comme il y a quarante ans, on verra monter le prix des réveillons.

Les misérables à la télé, c'est plus un film, c'est une réalité, avec les SDF sûr qu'on nous fait pleurer en oubliant qu'ils dorment dehors toute l'année.
On terminera le calendrier de l'Avent, pour les minous et les enfants qu'on arrive plus à différencier tellement les animaux sont personnifiés.
À l'église on fera semblant d'aimer son prochain en entonnant « Il est né le Divin enfant ».

On espérera avoir son petit paquet, si la prime de Noël est tombée ou si le patron a entrouvert son porte-monnaie.
Demain, on aura la gueule de bois en se rappelant que, tout ça, c'est fait pour amuser les enfants et plumer les grands.
Quand au facteur, s'il vient sonner avec son petit calendrier, on va gentiment lui rappeler que c'est quand on a des recommandés qu'il faut monter les escaliers.

Si on croit encore un peu on priera pour le salut d'un qui ne croit pas et qui, de toute façon, s'en foutra.
Plutôt que de regarder pour la centième fois « Le Père Noël est une ordure » à la télé, on ira tous un peu rêver en allant voir le dernier Disney au cinéma en 3D, c'est du plus bel effet.
Et on essaiera quand même de retrouver son âme d'enfant en chantant « Petit Papa Noël » et en le guettant, tombant du ciel.

Isabelle


Jeudi 12 Décembre

Consigne 1 :

« Ah ! si j’avais un cœur en mon cœur… » qu'en ferais-je ?

Donc, un cœur dans un cœur, que dire ? Je ne me suis jamais posé la question, mais en réfléchissant, pourquoi pas.
Si j'avais deux cœurs, j'aurais plus d'amour à partager et à donner.
J'aimerais aussi avoir deux cœurs, l'un de mon âge et l'autre plus jeune.
La vie veut que le cœur se fatigue à cause des souffrances. Les pleurs, les joies aussi.
Le deuxième cœur m'aiderait à remonter de mes peines, mes pensées. Mais voilà, un cœur ou deux me servirait à vivre. Plus de cœur, plus de vie.
Si un membre de ma famille avait besoin d'une transplantation, je le lui offrirais volontiers pour qu'il puisse vivre plus longtemps et être auprès de moi toute sa vie.

Josette

 

« Ah ! si j’avais un cœur en mon cœur… »
Un cœur qui sache affronter
La violence des mots
Jetés
Comme des lames
Sur mon visage
Quand le vent me parle
Des pays désolés
Et déchirés
Qu'il a survolé
Et un autre
Niché en son creux
Qui chanterait
Pour m'emmener
Dans un rêve où
Le mal ne pourrait heurter
Tout ce qui est innocence
Et me ferait croire
Que la vie vaut la peine de continuer

Isabelle

 
 

Ah ! si j’avais un cœur dans mon cœur...
D'abord il faudrait définir qui est qui et qui fait quoi
Un premier qui pousse, qui bat au rythme de ma vie
Poussant la vie à la plus petite de mes cellules
Un autre plus irréel, celui qui fait monter les larmes aux yeux
Qui fait que la poitrine se serre
Que les yeux se mettent à briller
Il fait aussi se dresser les cheveux sur la tête
Les poils sur les bras, ainsi que la chair de poule
Il arrive parfois que les deux ne soit pas en phase
Ce qui a pour effet de vous voir devenir tout rouge
Il peut arriver que l'un des deux vous fasse tourner la tête
Mais là se pose la question : lequel des deux ?
Un cœur dans un cœur
Indissociables dans la vie humaine

Jean

Si j'avais un cœur en mon cœur
Je surveillerais le premier pour ma santé.
L'autre serait divisé, pour faire autour de moi le bonheur,
Éviter les conflits et les guerres,
Les injustices et la misère.
Donner de l'espoir à ceux qui souffrent.
Mais, surtout, il serait ouvert à ceux que j'aime :
Enfants, parents, amis, pour eux, pas de frontières.

Francine

Ah ! si j’avais un cœur en mon cœur !!!
J'essaierais de le préserver des innombrables attaques
Dont il ferait sans arrêt l'objet.
Les décharges
Les emballements
Les écroulements
Qui font monter les larmes
Au profit des belles choses
Qui passent par les sens
Et qui procurent une chaleur bienfaisante
Les fleurs
Les immensités où sont présentes toutes les nuances de l'Univers
Les vents doux qui passent sur le visage
Qu'on apprécie les yeux fermés
Et qui font battre le cœur paisiblement.
La paix du cœur entraîne naturellement
Celle de l'âme
Et de la vie qui coule longuement
En marchant longtemps.
Ce cœur qui bat lentement
Fait le sourire éternellement permanent.

Pascal

 

Consigne 2 :

Mariez dix vers de chacun des poèmes "Mes chants" et "Métier à tisser" de Ali Sadki Azayku

 

Quand à mes pas
Ils sont lourds de sens
Je ne puis les suivre
Solitaire, je suis entravé
Oubliant ma servilité
Ma langue est pourtant vive
Accusant le brave de légèreté
Plus jamais nul ne t'écouteras
Nous protégeons nos cœurs
Nous sommes désormais ailleurs
Nous tissons un ouvrage de lumière
Le temps « réclot »
Dans l'attente de
Rallumer le feu des jours

Jean

Libre
Vers les étoiles me dirige
Nul ne les reconnaît pourtant
Ma passion qui m'emporte ne sait
Rallumer le feu des jours

Quand mes pas
Libres
Dans l'attente de
La corde au cou,
Savent labourer la lune,
Le temps et « réclore »
Au noble ouvrage de mon peuple,
Ils sont lourds de sens

Nous tissons un ouvrage de lumière
Mes chants sont ceux des hommes
Parce qu'ils croient
Quoi que tu dises
Nous protégeons nos cœurs
Nous sommes désormais ailleurs     
Dans l'attente de l'aurore qui point

Isabelle

 
 

Mes chants sont ceux des hommes Libres
Qui vers les étoiles me dirigent
Solitaire, je suis entravé
Je ne peux les suivre
Ma langue est pourtant vive
Lui disant : « Voilà que tu marches sur les mains »
On passe et nous abandonne
Nous tissons un ouvrage de lumières
Plus jamais nul ne t'écoutera
Nous protégeons nos cœurs
Nous sommes désormais ailleurs
Dans l'attente de l'aurore qui point
Rallumer le feu des jours
Gare au vent matinal
Se métamorphoser en étoiles
C'était grâce à lui
La corde au cou
Accuse le brave de légèreté
Personne n'en veut
Il refuse de vivre

Francine

La corde au cou,
La Terre me tire vers le bas.
Ma langue est pourtant vive,
Accuse le brave de légèreté.
Elle bruisse encore,
Lui disant : « Voilà que tu marches sur les mains !! »
Se croyant encore debout
Au milieu des sourds, nulle fatigue.
De sa trame de fleurs,
Personne n'en veut.
Chimères ! Dit-on,
Dans l'attente de l'aurore qui point.
Mes chants disparaîtront comme tu disparaîtras,
Gare au vent matinal.
Mes chants sont ceux des hommes libres
Dont même les derniers venus,
Quoi que tu dises,
Savaient labourer la lune.

Pascal

 
 

Mes chants sont ceux des hommes Libres.
Vers les étoiles, quand mes pas me dirigent
Vers le bas, nul ne les connaît pourtant.
Je ne puis les suivre, ils sont lourds de sens.
Qui peut les chanter, solitaire, je suis entravé
Parce qu'ils croient que tout voyage est errance.
Et moi qui raisonne encore, notre chant l'est aussi.
La corde au cou, ma langue est pourtant vive,
Ma passion qui m'emporte ne sait ni comment se conjuguent
Ni comment se cerne un chemin de vie,
Au milieu des sourds, nulle fatigue.
Indécis, l'homme vil quant à lui,
Le verre plein, se doit,
- Tourne autour, s'arrête -
D'étancher sa soif.
Mes chants sont ceux des hommes Libres
Disant : « Voilà que tu marches sur les mains ».
Oubliant sa servilité, personne n'en veut.
« Chimère », dit-on, il refuse de vivre.
Nous sommes en pleines ténèbres,
On nous tend un piège,
Nous tissons un ouvrage de lumière.
De sa trame de fleurs plus jamais nul ne l'écoutera.
Quoi que tu dises, nous protégeons nos cœurs.
Au noble ouvrage de mon peuple,
On n'oubliera jamais tes chants.

Josette